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Secret partagé…jusqu’où ?


Centre Primo Levi

EDITO :


Tenir secret



La violence nous parle.

Une langue éternelle, une langue universelle, un désesperanto.

Désarticulée, en creux et en bosses, par onomatopées, la violence nous parle.

Elle nous parle de destruction, de délitement, de dénuement.

Et ce qui est à terre, ce qui est défait, ce qui est à nu dit de quoi nous sommes faits, dit ce que nous sommes, dit ce qui nous tient.


La violence n’a pas de secret pour nous.
Le secret, c’est le thème de ce numéro de Mémoires.
Quand nos patients arrivent au Centre Primo Levi, la violence les a réduits au silence, elle a fait refluer la parole dans des lieux tenus secrets, au plus profond de leur intimité.
Commence alors un long travail qui vise à démêler l’écheveau de la parole, du silence et du secret.
Pour nos patients, tenir secret c’est d’abord trouver un refuge en eux-mêmes, un espace propre qui n’a pas été exproprié, souillé, c’est une respiration, un jardin.
Mais le secret c’est également la peur de l’autre, la peur de dire à l’autre, c’est la méfiance, la honte aussi.
Nous sommes ici au cœur du projet tortionnaire, totalitaire, qui consiste à faire de l’être humain un être taisant.
C’est quand la défiance généralisée s’installe que le totalitarisme peut asseoir son emprise, quand plus personne n’a confiance en l’autre, quand toute parole est un aveu, quand tout devient secret.
Rithy Panh (membre du comité de soutien du Centre Primo Levi) l’a parfaitement décrit dans son livre L’élimination.
Le secret, enfin, c’est un droit, le droit au secret, le droit de voir ses secrets respectés, protégés.
Nos patients, brutalisés, ont perdu la faculté, la liberté, de choisir, de savoir ce qui relève de la parole, du silence ou du secret.
Or, être libre c’est décider de parler ou de se taire, c’est décider à qui on parle et de quoi on parle.
Au Centre Primo Levi nous aidons nos patients à retrouver la liberté de «tenir secret», ce secret qui est l’apanage le plus intime et le plus digne d’une parole libre et vivante, d’une parole qui n’a pas peur de se taire, d’une parole consciente de ses droits.
Tenir secret c’est tenir debout.

 

Antoine Ricard, président du Centre Primo Levi


DOSSIER

Secret partagé… jusqu’où ?

p.5 • Interpréter n’est pas dévoiler, par Eric Sandlarz, psychologue clinicien et psychanalyste au centre de soins Primo Levi

p.8 • Le secret professionnel et le partage d’informations, par Sibel Agrali, directrice du centre de soins Primo Levi

p.10 • Le patient, ses secrets et le médecin, par Natacha Regensberg – De Andreis, médecin généraliste

p.12 • La déconstruction de la vie privée des demandeurs d’asile, par Jean-Philippe Foegle, Doctorant en droit public au Credof (Université de Nanterre)

p.15 • Se confier en toute confidentialité, par Aurélia Malhou, juriste au centre de soins Primo Levi

p.16 • Entre le témoignage et le respect de l’intime, Interview de Rony Brauman, médecin et ancien président de Médecins sans Frontières, par Jacky Roptin, psychologue clinicien et psychanalyste au centre de soins Primo Levi

 

ENFANTS & FAMILLES

p.18 • Le droit au secret, par Armando Cote, psychologue clinicien et psychanalyste au centre de soins Primo Levi


Éditée à plus de 1000 exemplaires, la revue d'information Mémoires  (3 numéros par an) propose des contenus denses en lien avec les problématiques rencontrées au centre de soins Primo Levi. C'est un espace de réflexion et de débat, ouvert à des contributeurs extérieurs, sur les questions relatives aux effets de la torture et de la violence politique, à la prise en charge adaptée et au droit d’asile en France et en Europe.

Les illustrations sont signées de Jean-Christophe Lie, animateur et réalisateur de films d'animation.











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